Le mot du pédagogue
Comme je le dis lors de mes conférences ou comme je l’ai écrit, être parent, en 2020, ça s’apprend. Ne comparons plus aujourd’hui avec l’époque de nos parents, encore moins avec celle de nos grands-parents. En effet, l’évolution de la société est telle aujourd’hui qu’il nous est difficile de nous adapter à elle avec justesse.
Certains parents m’expliquent qu’ils apprennent à devenir mère ou père, petit à petit, jour après jour, en s’adaptant à la personnalité et à l’histoire de chacun de leurs enfants, même s’ils reconnaissent avoir commis des erreurs parfois, mais heureusement, car qui peut prétendre aujourd’hui réussir l’éducation de ses enfants à 100% ? Si vous en connaissez, surtout, présentez-les moi !
De nos jours, la génération des jeunes parents a besoin d’aide. Le couple est obligé de travailler, de “faire des heures” pour essayer de boucler les fins de mois. Beaucoup de parents culpabilisent et se sentent dépassés car “tout va trop vite”… L’évolution rapide de la technologie n’est pas étrangère au problème. Les jeunes parents sont à la recherche de conseils car les enfants, même très petits, présentent les premiers troubles de l’attention et piquent beaucoup trop de colères… Cette nouvelle génération de parents veut être aidée, voire stimulée, pour apporter des réponses cohérentes, avoir une attitude adaptée en fonction des différentes situations qui se présentent à eux avec leurs enfants.
Mais il ne faut surtout pas tomber dans le piège de la compétition ; on ne se mesure pas aux autres parents. Tout s’est bousculé avec les progrès récents des neurosciences affectives qui permettent aujourd’hui de mieux mesurer l’impact de certaines erreurs éducatives sur le cerveau des enfants comme la fessée, désormais interdite par la loi. D’ailleurs, toutes les croyances d’antan sont balayées, et beaucoup de nouveaux parents ont la pression, déboussolés par l’obsession actuelle autour de la bienveillance.
Le souci est que, sur le marché de la formation pour devenir de “bons” parents…, on trouve tout et son contraire. En effet, en tant que pédagogue, j’ai l’intime conviction qu’il est fondamental de distinguer tout ce qui vient des sciences éducatives, prouvé scientifiquement, et ce qui relève de “l’expérience personnelle et des recettes simplistes”, explique la psychologue Blandine Sagot. Et elle a entièrement raison. Le tout est dans la formulation de la demande que l’on adresse aux enfants (choix des mots, tournures de phrases, etc.). Les recettes toutes faites n’existent pas, contrairement à ce qu’on laisse croire, d’où ce sentiment de culpabilité, de remise en question, d’incompréhension du parent qui ne sait plus quoi faire, n’ose plus, et sa créativité est ébranlée. Il est pétri de doutes, et les enfants le ressentent : ils peuvent ressentir de l’insécurité, puis partir dans tous les sens.
Au sein de notre école des parents “le Cercle des Parents pas Carrés”, il arrive, lors des conférences-débats, d’organiser des ateliers avec les parents. Un professionnel anime l’atelier ; il comprend bien l’enjeu de chaque situation, et pousse les parents dans leurs retranchements. L’animateur doit être un facilitateur d’échanges ; c’est obligatoire pour avancer.
Nous commençons toujours par travailler le cadre qui crée sécurité et liberté, au sein de notre école des parents, comme à l’école-collège Dominique Savio d’ailleurs. Il faut assurer le développement neurocérébral de l’enfant. Un exemple concret : “il n’a pas respecté la règle ? On lui en montre les conséquences pour qu’il puisse réparer et en sortir grandi”. Les parents ont besoin qu’on leur donne des pistes “pour enrichir la communication, apprendre à écouter les émotions des enfants sans les nier”, explique très justement Sandrine Schöner, thérapeute familiale qui anime les ateliers Faber et Mazlish.
En 2020, devenir parents, cela s’apprend à travers des ateliers qui allient jeux de rôle, échanges entre parents, discussions avec les animateurs. Il ne faut surtout pas se dire que les autres parents sont là pour vous juger ; ce n’est pas l’objectif de ces rencontres, bien au contraire. Elles sont l’opportunité de “sortir la tête de l’eau” et de se rendre compte que l’on n’est pas seul à “galérer” pour élever ses enfants, que chacun fait ce qu’il peut avec ce qu’il est et ce qu’il a. Alors, n’hésitez pas : poussez la porte de notre Cercle des Parents pas Carrés !
Christophe Labrousse